New York, jour 4: Because we can
Il faut croire que, comme partout ailleurs, on s'habitue à New York comme à n'importe quelle autre ville. Ce matin, dans nos environs immédiats, nous avons cherché à trouver quelques détails, expressions et expérimentations artistiques dignes de ce nom. La recherche de vestiges créatifs ancrés dans la réalité quotidienne de ces êtres dont nous ne connaîtrons jamais le nom s'est avérée fructueuse. Comme des voyeurs créatifs, nous avons exploré, autour du Box House Hotel, quelques perles de ce Brooklyn qui nous sert de refuge.
Perdus dans la faune, entre graffitis, garages et entrepôts, nous avons trouvé un taxi. Les chauffeurs new yorkais sont chiches, précieux, voire capricieux. Hors de Manhattan, chacun a ses règles : "je ne vais qu'à Queens", ou encore "je dois rendre la voiture, faites vite". L'éthique du service-client est ici différente de celle qui prévaut dans d'autres capitales. Les chauffeurs ne connaissent pas les lieux-dits, ils vous demandent des précisions, se trompent, vous amènent au mauvais endroit. On retrouve le "Seven Train", mais trois stations trop loin. Au moins, la vue est belle.
Notre premier rendez-vous est au Ace Hotel, qui héberge une faune remarquable de voyageurs et de locaux. D'une pièce à l'autre, les ambiances changent, le service aussi. La conception architecturale et graphique des espaces, leur signature très marquée, tisse un fil rouge d'une pièce à l'autre.
Le petit déjeuner terminé, nous filons aux conférences, recharges et wifi inclus. Après la journée d'hier, nous avons nos habitudes et nos repères dans les amphithéâtres. Nous restons sur la 42nd Street, entre le B.B. King et le Liberty Theater. Il y a du wifi, et malgré la climatisation délirante, on se fait rapidement une raison. Nous faisons un effort marqué. Le contenu n'est pas si mal. Midi arrive.
S'il y a bien en Amérique une chose qu'on sait bien faire, c'est le hamburger. Chez Five Guys, on élève la confection du célèbre sandwich emblématique du fast food au rang de pratique artistique. Nous avons droit, sur fond d'éclairage trop blanc et d'emballages en aluminium, à l'un des meilleurs burgers "minimalistes" qu'il nous ait été donné de goûter. Même à Times Square, dans l'urgence et l'impersonnalité, on trouve malgré tout ces franchises prêtes au dépassement. Les pommes de terre sont coupées sur place, chaque jour. Le producteur y est identifié. Ils ont une page web en français. Ouep, ça le fait.
Les conférences en après-midi évoquent davantage les processus de créativité. Paul Lavoie, de Taxi, participe à deux panels successifs. Il nous sert, à propos de l'évolution du secteur publicitaire, certaines des citations qui resteront marquantes de notre périple new yorkais. "Fuck the past", en guise de conclusion. Il faut voir, à ce sujet, notre billet chez Infopresse.
Brillantes parmi toutes en cet après-midi sur le thème de la créativité des agences, des femmes qui présentent avec force les idées qui guident leur processus. Susan Credle, Chief Creative Officer de la prestigieuse agence Leo Burnett, fait une forte impression (ci-haut, avec Paul Lavoie). Plus tard, ce sera la directrice de création média de Citi North America, qui nous parlera du Citi Bike (nos BIXI, exportés dans la grande pomme) avec verve en enthousiasme. Sur la scène du Times Center, l'auteure Sheryl Sandberg est même venue faire un tour pour vendre son koolaid. Les conférences se terminent. Les rues de la ville nous appellent.
Nous filons vers Soho, où Float4 et Boogie Studio nous ont préparé une soirée haute en couleur. Avant de nous rendre à la soirée, nous déambulons un peu dans ces rues pavées. Ça sent l'histoire, et c'est aménagé comme le Vieux Port de Montréal sur les stéroïdes. Les boutiques élégantes côtoient les escaliers en fer. Tout est ancien, porte la trace du passé, mais remis à neuf. Il faut la main de maîtres pour se bâtir une mémoire collective.
La mise en scène Float4 / Boogie Studio a lieu au LED Lab, un espace d'exposition et d'exploration situé à la pointe nord-est de Tribeca. Le DJ Dee Granger côtoie la VJ Cadie Desmeules-Desbiens, une geekette comme il s'en fait peu. Ensemble, ils transforment l'espace en une expérience son et lumière interactive.
Une Kinect permet de suivre les mouvements des passants, un écran lié à un iPad montre une voiture sport ; la surface réagit au toucher, on peut changer les couleurs, la transparence, allumer et éteindre à distance. Tous les mouvements sont fluides, les conversations vont bon train, on parle d'interactivité, de motion sensing, de création par algorithmes. Sur des écrans fabriqués d'une infinité de petits DEL, l'artiste Cadie projette ses créations.
L'événement s'achève sur le constat de son succès. Les créateurs sont contents. Les agences aussi. On est à New York. Il fait nuit. Dans un moment de folie, Louis-Félix propose d'aller au Apple Store de 5th Avenue. C'est en chemin. Enfin, pas vraiment. Mais presque. Félix n'aime pas particulièrement l'iPhone. Il s'amuse du fait Samsung ait annoncé un version Gold.
"Mais pourquoi veux-tu aller chez Apple à cette heure, Félix ?"
"Because we can!"